LES HIVERNALES

Avec ses 36 lettres, Hippopotomonstrosesquippedaliophobie* renvoie à la phobie des mots trop longs. Le néologisme humoristique a amusé le Collectif ÈS : le terme improbable leur inspire une matière à penser et à danser en forme d’épisodes qui se jouent, se répètent, s’accélèrent. Collectif ÈS (comme espiègle ?) nous offre un spectacle décalé réjouissant à l’énergie communicative. Avec une écriture très maîtrisée, les 3 danseurs chorégraphes tricotent, sur un rythme effréné, des séquences teintées d’une gestuelle à la Buster Keaton. La bande sonore passant de la musique napolitaine du XVIIe à Dalida finit de donner le ton ! 

Voici que dans Soulèvement, Tatiana Julien donne à ressentir les puissances de la secousse et de la résistance, qui permettent de passer de l’immobilité à la mise en mouvement, de l’accablement à l’énergie, de la soumission à la révolte. Son mouvement se fait saccadé, persistant, frénétique. Plutôt que de se soucier de structure et de forme, sa danse travaille l’énergie, et se fie pour une part à l’improvisation. L’engagement du corps va de pair avec celui des sons ; plus particulièrement des mots, puisés dans les grands discours où l’art est venu à la rencontre de la révolte. Beau paradoxe : un état rattaché aux mouvements collectifs de l’histoire, s’incarne ici en solo. Sans concession. Gérard Mayen